03 février 1982

J116 - Goa, jour 34 : entre rat et serpent


A. n’est pas venue présenter aujourd’hui ses salutations au français de Kismat Mahal.

Du coup, ce matin, j’ai lu « Saint Quelqu'un » de Louis Pauwels qui traite d’un détachement et d’une illumination sans fariboles indo-mystiques.
Et quand je l’ai eu fini, j’ai continué à consulter la vie, l’œuvre et le message d'Aurobindo.
Puis j’ai déjeuné, lu à nouveau, et promené mon ennui et mon acteur au marché de Calangute où j’empruntais un Léo Mallet, « Le soleil naît derrière le Louvre ».

Boire, manger, dormir, trilogie monotone que j’irai rompre ce soir en dialoguant avec les étoiles, sous la lune et sur la plage.

Et après ?

La nuit s’est déroulée autrement que je l'avais prévu, non entre la lune et le sable, mais entre le rat et le serpent.

Le rat, je ne le connaissais pas mais je l’ai vu, horrible et l’ai senti gambader sur mes guibolles.
Le serpent, je ne l’ai pas vu mais je l’ai senti s’éveiller, sourdre en moi, provoquant de violentes contractions spasmodiques et délicieuses pendant une bonne partie de la nuit. Est-ce une sensation qui résulte d’une exacerbation psychique ? Ou une véritable énergie qui d’habitude sommeille, ignorée par notre intellect ?
À part le serpent Kundalini lové dans son nid au bas des dernières vertèbres, un autre animal, qui devient vraiment par trop familier, m’a rendu visite cette nuit.

Je l’ai entendu trotter autour du lit et lorsque j’ai fait de la lumière, seul restait à la hauteur de ma tête cette croûte de pain dur.
Après avoir éteint, le même bruit se répète et, peu après, notre ami trottine allègrement sur mes jambes, me remonte le long du corps pour disparaître derrière ma tête. Vraiment une bête importune !
Ensuite, c’est dans la pièce contiguë que se manifeste à nouveau sa présence. Je le surprends dans mes sacs, cherchant des victuailles. Il est laid, gros, son visage rosâtre taché de gris et son corps prolongé d’une grosse queue noire. Il s’échappe et un peu plus tard, le revoilà au même endroit. Auparavant, c’était dans les poutrelles du toit qu’il se cachait, laissant pendre du plafond son appendice sale et repoussant. Sale rat !


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